Le blog du bateau ivre

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Au bras, quoi

Eh bien, oui, à quoi vouliez vous qu'elle s'accrochât ?
C'est ce que me disait une vieille amie d'un forum ami (pas Mummy) avec qui nous avons réécrit cette description qu'elle signe ici sous ma plume.
Attention, pour ne pas sécher devant la chute de Nasbinals, capitale de l'Aubrac lozérien, ne pas s'approcher trop près de ce post si l'on n'est équipé d'un solide appétit humoristique !
A cheval sur trois départements, à califourchon sur ces trois piliers que sont le Laguiole, le Salers et l'Ecir, éperonnant sa monture jusqu'à l'y épuiser, en tout bien tout honneur bien entendu, l'Aubrac étend ses hauts plateaux, non, pas de dangereux fruits de mer, car la mer tue, me dit mon partenaire, mais a reculé depuis bien longtemps, mais de verdure (lo ver dure, comme on le dit en patois) et de solitude apaisante. De cette région légendaire (de repos) émerge la Lozère et son forum LoL où le bon temps des railleurs est désormais révolu, il faut le dire, la Margeride est bien placée pour le savoir qui a payé un lourd tribut au sarcasme et, en effet, n'est-il pas plus injuste de ne retenir que la paille dans la bouche lippue de la margerieuse que de se foutre, comme de sa première outre, de la poutre dans l'œil du cyclone aubracois, car c'est bien d'un tycoon qu'il s'agit, ce que je ne vais avoir de cesse de vous démontrer.
Dès son plus jeune âge, l'enfant y compte tout, à commencer par les vaches. Il fait des compétitions (non ! pas sur l'eau) avec ses amis du coin, certains en ont même compté jusqu'à mille sur un plateau voisin ! Dès l'école, son sens du calcul fait merveille, aussi n'est ce pas étonnant de constater que beaucoup de ces enfants s'y appellent Blaise, Pascal, Evariste, Gallois. Ce dernier rappelle d'ailleurs la présence britannique dans cette région il y a quelques siècles, des gallois dont les noms incompréhensibles (Cwmystwyth, Aberffrwd, par exemple) se sont regroupés commodément en un nom générique, de grands écossais au visage émacié (l'ascétique de Glasgow) dont les noms d'origine sont tombés dans l'oubli (Mc Donald, Mc Cormick, Mc Enroe, Mc Arthur par exemple) ou bien encore des angles, morts ou vifs, dont il faut se méfier aussi bien devant que derrière tant ils sont dangereux.
Faut-il rappeler par ailleurs l'extrême influence étrangère dans cette région, avec, en sus de ceux mentionnés ci-dessus, les mongols dont des yourtes subsistent à Aubrac et un exemplaire à Vébron ou bien encore des flamands (pas les roses, ceux de Belgique) ou bien encore de la police montée canadienne du côté de Barre des Cévennes (la Garde Républicaine, dîtes vous, ah bon, en prévision sans doute de futurs méfaits du Front de Libération de la Lozère). Restons, si vous le voulez bien, un instant dans les Flandres, notamment au sein de la cour du Comte éponyme, dont faisait partie le Vicomte moine, Adalard d'Eyne (belge), bouteiller dudit Comte et qui organisa notamment la construction de la dômerie d'Aubrac, à la fois hôpital et forteresse. La profession de ce moine n'est sans doute pas étrangère à la base ale thé dont l'angle fait son breuvage ordinaire. C'est que ce dernier est fin connaisseur de bières, ainsi l'ale Bion, sa préférée, l'ale Terre, qui fait mal quand elle tombe sur les pieds, mais qui n'épanche pas la soif, l'ale Ambra, avec qui il passe des soirées délicieuses, l'ale Alamein, en souvenir de vacances en taxi pour Tobrouk, l'ale Binos, qui donne le poil blanc et les yeux rouges ou l'ale Bumine, dont une consommation modérée est recommandée, ceci pour n'en citer que quelques unes. Quant au thé, pas de Darjeeling (ni d'Inde, ni de poule) en Aubrac, seulement le bon calament, que l'angle, obtus, put prendre un temps pour de la tisane, mais dont il découvrît bien vite les vertus revigorantes et euphorisantes. En conséquence de quoi, l'abus devenant l'us, les sirs d'Aubrac n'ont pas bonne mine, le teint jaune, la chair molle, mais un goût délicieux. Je confirme pour en avoir essayés. Mais, que me faites vous dire là ?
On pourrait sourire de tout cela, mais ce serait sous estimer l'authenticité et l'intensité de la mornitude qui génère une consommation excessive de boissons alcoolisées dans cette province. En effet, sur ce plat plateau où les chameaux blablatèrent, où les cloportes cantalous colportent la rumeur d'Outre Truyère, où les crapauds crapotent de solitude dans une eau croupissante, où les bailleurs baillent d'ennui devant les créances irrecouvrées et où, finalement, il est plus fréquent de croiser un évêque qu'un indigène, le mal majeur ne serait-il pas l'absence de circulation, du sang (la varice), des capitaux (l'avarice), routière (les caristes) et des carcasses (l'équariste) ?
L'aubracien est en réalité responsable de ce désert qu'il a crée en faisant fabriquer à l'extérieur de la région tous ces bons produits aubracois, tels le fameux Thé concocté à Brive ou bien le non moins célèbre couteau Laguiole, sous traité à Thiers depuis les années 20 et auquel les bougnats parisiens demandèrent dès 1880 l'adjonction d'un tire bouchon ou bien encore les Manouls de Lozère à St Flour ou bien encore l'aligot dont le meilleur exemplaire connu est consommé à Paris. Cet expansionnisme s'est naturellement accompagné d'un comportement colonialiste qui l'a amené à faire rentrer des africains pour y construire des ponts et, délire suprémissime, y paver de basalte des cours de ru.
Cette prétention démesurée l'amène également à prendre ses cascades pour celles d'Iguaçu, ainsi celle du Déroc, qu'il a affublée de ce nom redondant pour faire croire qu'il y en a plusieurs ou bien celle de Lacessat qu'on peut facilement escalader avec un escabeau à deux marches.
C'est que, de père fide et de mère cantile, mi angle, mi démon, sa personnalité est complexe, mais, par dessus tout, faut-il le souligner, il n'aime pas travailler.
Paresseux, pendu par les pieds du haut d'un arbre, il contemple le travail accompli. C'est, qu'à part compter, il ne sait rien faire de ses dix doigts, ce que regrette l'aubracienne, qui n'est pas sans reproche non plus. En effet, brune, frisée à l'excès, elle souffre, comme ses consoeurs margerieuses et portugaises, d'un excès de bigosité, qu'elle peine à éradiquer jusqu'à la racine. Là on ne fait hélas de maillots que de corps. On peut croiser ces femmes ainsi quelquefois sur la route de St Jacques entre le Puy et Nasbinals, à l'image du Faucon Pèlerin qui accompagne le vrai (pèlerin) trois fois par jour et retour tel le Sémaphore Nordiste du Chemin Faisant. Mais où en étais-je donc, ah oui, l'angle est encore présent et je m'en vais en Randonnais le bouter hors de France, arrivée sur place, on me dit qu'il est parti depuis longtemps, soit ! Dépitée donc de n'avoir pu secourir le beau Bertrand, aussitôt quittée Chateauneuf, je me dirige alors vers Rieutord où l'on m'a dit y trouver, à défaut d'angles, des cloches à bouter (les pièces de bronze, pas les habitants), cela devrait être rapide, car il ne doit pas y en avoir beaucoup, il n'y en a en effet que sept. Mais, comme il n'y en avait pas assez, la population en a ramené une de plus cet été (Ste Epiphanie), donc huit. Boutade faite, c'est
l'exercice de la réunion d'évêques dans le Nord Gévaudan, qui, à défaut de fêtes votives, retient notre attention et constitue un des moments forts de l'été dans ces contrées. On les trouve généralement regroupés autour de l'inauguration d'une cloche ou d'une croix, que le gévaudanais se plait à copier comme celle de Fadoumal ou bien celle des Trois Evêques, la bien nommée et coller pour la partie haute de la croix. Une récente manifestation a eu lieu, qui réunissait, outre les trois habitués, celui de Sens ainsi que l'archevêque de Rabat. Autour de l'aligot, auquel furent donc ajoutées liqueur de cassis et semoule, fut conviée la population dont certains membres manquèrent de s'étouffer. En ces temps de disette de conviction religieuse, il faudrait soigner un peu plus le chrétien !
Le jeune aubracien, disé-je donc quand le britannique s'immisça dans la conversation, veut toujours en compter plus et se demande où il va trouver des veaux en grande quantité. A Paris, conclut-il, ce qui l'amène quelques années plus tard à émigrer vers la capitale. A la recherche des étendues verdoyantes de son enfance, il trouve une échoppe près du Bois de Boulogne où il s'installe avec son épouse qu'il fait rapidement localement labourer pour recueillir quelque fraîche, légume bien entendu, pendant, qu'attablé au comptoir, y jouissant d'une bonne pipe, il refait, avec force fumées, canons et pastis, la guerre de cent ans en Nord Gévaudan avec des compagnons d'exil. Le soir, comptant sa caisse avec fébrilité et n'y trouvant pas ce qu'il y manque, il repense au pays, notamment à ce Trou du Souci où une partie de l'eau de la rivière locale disparaît pour réapparaître plus loin dans d'autres poches (de rivière).
S'enrichissant néanmoins avec les ans, bien qu'avare, il offre à sa compagne d'infortune, une ferme, fortifiée, qu'il surnomme des bourines, en référence à l'inactivité forcenée de celle-ci (à voir absolument). Pendant ce temps, toujours prêt à goûter des crus qui cuitent ses clients, il se rend souvent dans des hospices, drus à Beaune (pas à la Salle Pêtrière évidemment) où quelques uns de ses amis restent à demeure (leur dernière).
Tant d'errements, d'enterrements le poussent à revenir au pays le reste de son âge. Ainsi donc, lui, laid et usé et elle, riche et démodée (les sabots et la coiffe, ça n'a qu'un temps à Paris) reviennent dans la capitale de l'Aubrac lozérien y retrouver leur fils et c'est qu'il n'est pas peu fier d'y marcher aux côtés d'une has been à l'aise, Blaise !
Donc, l'Aubrac est coupable et il ne sera que d'écouter la plaidoirie de son défenseur pour vous en convaincre (tribunal des flagrants délires Pierre Desproges).
A vous de jouer et d'en jouer.


25/03/2006
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